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Pièce vue le 24 avril 2019 au Centre Culturel Le Rive Gauche, à Saint-Étienne-du-Rouvray

© Tristan Jeanne-Valès

 

Les metteurs en scène Jean Lambert-Wild et Lorenzo Malaguerra nous proposent ici un spectacle autour du mythe de Dom Juan, adapté à travers les siècles dans la littérature de mille et une façons.

 

Si Dom Juan est très souvent associé à la figure du séducteur, pour les deux créateurs, il s’agit avant tout d’un personnage s’opposant à toute règle sociale et morale, qui vit dans le plaisir de la vie, et qui entretient un rapport complexe avec la mort.

 

La mort… Elle est omniprésente. Le rideau s’ouvre et nous découvrons un Dom Juan riant aux éclats qui joue à la roulette russe. Dans le fond, le crâne de sa mère trône sur un meuble. Même son éternel compagnon et valet de toujours, Sganarelle, est vêtu d'un costume de squelette et annonce ainsi l'inéluctabilité de son destin funeste. 


 

© Tristan Jeanne-Valès

 

Mais le rapport qu'entretient Dom Juan avec la mort repose avant tout sur la figure du Commandeur, noble espagnol tué par notre bourgeois libertin. Dans la pièce de Molière, le Commandeur n'apparaît jamais vivant ; nous ne le découvrons qu'à l'acte III sous la forme d'une statue. C'est souvent ce personnage qui pose le plus de problèmes aux metteurs en scène : comment le représenter ? Ici, Jean Lambert-Wild et Lorenzo Malaguerra ont pris le parti de ne pas le montrer... Toutes les scènes dans lesquelles le Commandeur est présent se déroulent dans une grotte. Cela ajoute du mystère ; cette impression se renforce encore lorsque la mort vient cueillir Dom Juan : plusieurs comédiens – des spectres –  apparaissent masqués, vêtus de pyjamas blancs et bleus, à l'image de celui qu'ils vont emporter. Bercée d'une douce lumière, la scène, bien que très courte, est envoûtante. 

 

 

Tout cela contraste fortement avec la scénographie éclatante, quoique légèrement étouffante, de Jean Lambert-Wild et Stéphane Blanquet.

 

Nous voilà transportés dans une jungle tropicale, au cœur d'une plantation de café. L'ambiance est angoissante ; nous voilà pris par la moiteur ambiante. Malheureusement, les acteurs aussi sont écrasés par les immenses tapisseries colorées qui envahissent le plateau et leur jeu en pâtit.

 

 

© Tristan Jeanne-Valès

 

Si la pièce est inspirée du répertoire de Molière, on y retrouve également – par exemple – des extraits du texte de Tirso de Molina, moine espagnol qui fût le premier à faire appel à la figure de Dom Juan dans son œuvre El burlador de Sevilla y convidado de piedra (Le trompeur de Séville et le convié de pierre).

 

 

De son côté, le texte de Molière est largement tronqué… Oui, mais sans soute un peu trop car il finit par être carrément léger !

Certains des personnages de l’œuvre de Molière en viennent à disparaître ; d'autres, au contraire, sont ajoutés : les comédiens de la pièce sont ainsi accompagnés par les musiciens et chanteurs suisses de la Compagnie de l'Ovale. Si cela ajoute un aspect burlesque au spectacle, reste encore à comprendre en quoi l'intervention de ces trois personnages éclaire le mythe de Dom Juan... 


 

© Tristan Jeanne-Valès

 

Le programme est honnête : Jean Lambert-Wild et Lorenzo Malaguerra veulent nous offrir une relecture décalée de ce personnage mythique. Pour cela, ils parient sur la figure du clown blanc, sur laquelle Jean Lambert-Wild, qui interprète Dom Juan, travaille depuis des années. L'objectif ? Faire que la charge comique ne soit pas réservée à Sganarelle et que la connivence soit toujours plus grande entre le maître et le valet. 

 

C’est un pari osé, intéressant… Mais finalement assez décevant. L’univers à la fois comique et tragique proposé ici ne fonctionne pas : on sourit, sans jamais vraiment rire, et le texte perd de sa profondeur. L’ensemble manque cruellement d’émotion.

 

 

© Tristan Jeanne-Valès

 

Direction Jean Lambert-Wild et Lorenzo Malaguerra

 

Avec Jean Lambert-Wild, Steve Tientcheu en alternance avec Yaya Mbilé Bitang, Denis Alber, Pascal Rinaldi, Romaine, ainsi que quatre acteurs/actrices en alternance issus de L’Académie de l’Union - École Professionnelle Supérieure de Théâtre du Limousin Claire Angenot, Gabriel Allée, Quentin Ballif, Matthias Beaudoin, Romain Bertrand, Hélène Cerles, Ashille Constantin, Yannick Cotten, Estelle Delville, Laure Descamps, Antonin Dufeutrelle, Nina Fabiani, Marine Godon, Isabella Olechowski, Nicolas Verdier

Tag(s) : #Expériences de spectatrice
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