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Pièce vue le 22 novembre 2018 au CDN de Normandie-Rouen. 

© Sophie Madigand

 

Ce spectacle de Rébecca Chaillon est un véritable OVNI théâtral !  

Je peine d'ailleurs à écrire mon article : que dire ? Par où commencer ? 

Une chose est sûre, que vous l'aimiez ou non, cette performance ne peut pas vous laisser indifférent. 

Où la chèvre est attachée, il faut qu'elle broute interroge les identités féminines dans le football et dans la société. L'idée ? Renverser les clichés : les filles qui jouent au foot sont toutes des "garçons manqués", voire des lesbiennes ; elles ne comprennent pas les règles ; elles jouent moins bien que les hommes, sont moins techniques. Rébecca Chaillon et son équipe cherchent ici à mettre un coup de pied à tous ces préjugés... Mais c'est raté ! Du moins, à mon avis. Et c'est dommage parce que ce spectacle aborde des thèmes cruciaux pour la construction d'une société plus inclusive : « Aujourd'hui le football [...] est régi par des hommes, par un système capitaliste qui en fait commerce, et il vient exacerber un nationalisme violent. J'avais envie d'aborder le sexisme, le racisme, les LGBTphobies, l'handiphobie, l'agisme... et tous ces endroits de hiérarchisation des individu.e.s » (Rébecca Chaillon). 

Si l'idée de départ est intéressante, la forme m'a laissé septique. 

 

© Sophie Madigand

 

Les spectateurs entrent petit à petit dans la salle. Chacun s'installe confortablement dans son fauteuil. Face à nous, une femme est installée dans des gradins ; elle nous regarde, une cigarette à la main. Nous aussi nous la regardons : elle boit de la bière et mange de la pizza. Le noir se fait sur le public. La scène s'éternise : deuxième bière, dixième cigarette et énième part de pizza. Bien...

Sur un écran géant, un match de foot. Féminin. 

Finalement, le plateau est pris d'assaut par onze joueuses / performeuses, toutes membres de l'équipe de foot Les Dégommeuses. 

Va alors s'en suivre une succession de tableaux malaisants et provocateurs. Oui, le théâtre peut et doit irriter, indisposer ! Il doit nous pousser dans nos retranchements et nous amener à nous questionner, à penser le monde différemment. Mais parfois, la provocation pour la provocation, bien qu'elle puisse avoir un objectif esthétique, dessert les propos défendus par les artistes. Il est clair que la provocation est ici une volonté affirmée par la metteuse en scène qui cherche à nous montrer des images fortes ; malheureusement, elle n'aboutit à rien de décisif. 

 

© Sophie Madigand

 

Peut-être ai-je mal compris les images qui nous étaient présentées... Mais j'ai eu l'impression d'assister à quelque chose de complètement désordonné, à une mauvaise farce qui ne fait rire que d'un rire gêné. 

Pour terminer sur une note plus positive, je dois tout de même avouer qu'un passage m'a plu : les joueuses de la Fifoune sont assises face à nous ;  l'une d'elle endosse le rôle d'une journaliste. Elle interroge chacune des femmes présentes sur scène et leur demande ce qu'elles pensent du football féminin. Place au débat. Car toutes sont loin d'être d'accord : si certaines tombent dans des clichés inverses que ceux évoqués précédemment, d'autres présentent le foot féminin comme un simple sport sans enjeux politiques.  

Cette scène montre à quel point il est difficile de traiter des sujets aussi sensibles et qu'il est facile de tomber dans l'extrême, quel qu'il soit. 

 

© Sophie Madigand

 

Texte et mise en scène de Rébecca Chaillon

Avec Rébecca Chaillon, Elisa Monteil, Adrienne Alcover, Adam M., Marie Fortuit, Patricia Morejon, Juliette Agwali, Audrey le Bihan, Yearime Castel y Barragan, Mélanie Martinez Llense, Patricia Morejon

Tag(s) : #Expériences de spectatrice
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